Le Parlement californien a voté hier une loi interdisant les tournages porno sans préservatif provoquant un tollé du côté des producteurs de films interdits aux moins de 18 ans, qui menacent, si la loi est appliquée, de déménager dans un état voisin. Explications.
Comme l’ouvrier du bâtiment qui porte un casque sur un chantier, l’acteur porno sera-t-il bientôt obligé de revêtir un préservatif au boulot ? La motion qui vient d’être votée à une courte majorité par l’assemblée de la Californie, état américain où se tournent la majorité des films X made in US, devrait bientôt obliger au port du latex dans les tournages situés sur son sol.
« Ce n’est pas une pratique privée, c’est une pratique commerciale. Nous devons commencer à traiter l’industrie du porno comme n’importe quel autre business en protégeant ses travailleurs », plaide Michael Weinstein, le président d’une des principales associations de lutte contre le sida dans les colonnes de nos confrères du Los Angeles Times. En se plaçant sur le plan du droit du travail et de la protection de la santé des salariés, il écarte d’emblée l’argument de la liberté de choisir de ne pas porter de préservatifs pendant les scènes hard et la liberté artistique tout court. « Je ne vois pas pourquoi les personnes qui travaillent dans cette industrie ne se verraient pas offrir la même protection que les ouvriers du bâtiment. » L’argument fait mouche.
Le X californien hétéro et gay pèse lourd et le port du préservatif, déjà confidentiel, régresse. Plusieurs dizaines de milliers d’emplois et des millions de dollars de chiffres d’affaires sont en jeu. Cette loi arrive à un moment où la plupart des studios sont déjà fragilisés par les offensives du porno gratuit sur internet. La réponse des studios américains : déménager leurs activités dans un état voisin. Une menace qui, si elle était appliquée, serait une véritable catastrophe pour la première économie des Etats-Unis et une aubaine pour le Texas ou les autres états frontaliers où les studios pourraient trouver refuge.
Ce ne sont pas des mots en l’air car, un an après l’application d’une mesure analogue dans la région de Los Angeles, les demandes d’autorisation de tournages X ont baissé de 95 %.
Le vote a été sévèrement critiqué par les représentant de l’industrie pornographique qui indiquent que des tests systématiques et obligatoires sont pratiqués sur tous les acteurs et actrices, ce qui supprime la plupart des risques de transmission de maladies même si le risque zéro n’existe pas. Certains expliquant même qu’il est moins dangereux de coucher avec une actrice ou un acteur porno - car il ou elle subit des prises de sang et des examens médicaux réguliers - que d’avoir des relations sexuelles avec un partenaire dont ne connaît rien de l’état sérologique. Ce qui est un fait.
Autre fait : ceux qui expliquent que les acteurs ne vont pas forcément attraper une saloperie en tournant une scène pourraient se voir rétorquer que l’ouvrier du bâtiment ne va pas forcément recevoir un parpaing sur la tête pendant ses heures de travail. Le débat n’a pas fini de faire couler beaucoup d’encre en renvoyant directement la responsabilité au consommateur de porno qui, pour l’instant, boude les productions avec préservatifs. Prochain épisode : le vote du Sénat de Californie. Dernière étape avant la promulgation de loi.
